Chemin de Croix.
Témoignage :
Véronique de Fombelle.
73 ans, thérapeute, auteur de Pour qu’un ciel flamboie (Éd. L’Iconoclaste, 2018)
La douleur n’est plus à vif, mais elle subsiste, incicatrisable. Il y a vingt-deux ans, quand Laurent, mon mari, est mort d’un cancer, un poignard s’est planté dans mon cœur. Aujourd’hui, le poignard s’est retiré, mais la béance est toujours là, signe que je ne l’ai ni oublié ni remplacé.
Nous avons eu la chance de partager pendant vingt-sept ans une vie conjugale très heureuse et d’accueillir cinq enfants. La nuit de sa mort, j’ai demandé à Laurent qu’il continue à jouer son rôle de père et d’époux. Il m’a répondu en me regardant au fond des yeux : « Je te le promets. » Depuis, j’ai découvert à quel point notre amour continue de rayonner bien au-delà de notre sphère familiale. Je ne me raconte pas d’histoire. Laurent n’est plus là. La chair manque sérieusement et le silence est terrible. Mais mon mari est quand même très présent et ma vie conjugale se poursuit autrement.
Ce n’est pas rien d’avoir sa moitié au Ciel. Je sais que Laurent est dans le cœur de Dieu. C’est là, dans la prière, que je le retrouve quand je veux partager avec lui. J’invoque d’abord l’Esprit Saint, je lis un texte de la Bible. Je passe par Dieu pour rejoindre mon mari. Puis je prends un long moment avec lui, je lui parle et j’essaie de l’écouter. Laurent me tire vers mon accomplissement. Depuis qu’il n’est plus là, j’ai le pied ailé. J’accompagne énormément de personnes grâce à mon métier de thérapeute que je n’aurais sans doute pas exercé sans ce drame dans ma vie. Mon livre aussi est un exemple de cet amour qui s’est élargi. Je suis convaincue que nous l’avons écrit à quatre mains. À chaque fois que je m’installais pour écrire, je commençais par une courte prière à Laurent : « Je ne veux rien écrire que tu ne pourrais signer. Guide ma main. »
Quand Laurent était encore avec nous, une nuit, j’ai eu la certitude qu’il allait mourir. Désespérée, je me suis mise à genoux devant le crucifix : « Seigneur puisqu’il meurt, je meurs aussi ! » Je me sentais happée vers l’abîme, précipitée le long de ses parois. Alors, j’ai entendu la Parole : « Je mets devant toi la vie et la mort, le bonheur et le malheur. Choisis la vie » (Dt 30, 19). Elle a stoppé ma chute. J’ai rendu les armes et, la mort dans l’âme, j’ai choisi la vie. Depuis vingt-deux ans, je suis fidèle à ce choix. J’ai vraiment l’impression d’être passée par la mort pour ressusciter autrement au prix du renoncement à tous mes plans, nos beaux projets. Laurent est mort en offrant sa vie. Il m’a fallu du temps pour accepter qu’il ne m’appartienne plus exclusivement. J’aime mon mari autrement mieux et de façon plus féconde aujourd’hui.
Propos recueillis par Florence Chatel pour Panorama.
En ce Vendredi saint, je me laisse encourager par le témoignage d’espérance de Véronique de Fombelle. Je peux noter les épreuves que je traverse pour le moment. Ensuite, dans un temps de prière, je les dépose dans le cœur de Dieu, afin qu’il m’aide me donne la force de les surmonter.